Favoriser une vie sociale épanouie : mode d’emploi
Le Mercredi 23 octobre 2024
Il n’y a pas d’âge pour se faire de nouvelles relations. Bien au contraire… et cela est aussi bon pour la tête que pour la santé. Alors, comment continuer à « faire société », à rester relié aux autres, à ceux de sa génération mais aussi aux plus jeunes ? Témoignages et conseils de spécialistes.
Pour vivre heureux, vivons reliés. C’est en substance ce que révèlent nombre d’études scientifiques ces dernières années. En effet, il a été démontré que des relations sociales de qualité accroissent l’espérance de vie. À l’inverse, la solitude et l’isolement font augmenter la mortalité de manière comparable au tabagisme ou à la consommation d’alcool*. Cependant, le passage à la retraite, l’éloignement de la famille, un déménagement ou encore la perte d’un proche constituent autant de ruptures et d’étapes qui rompent un équilibre parfois difficile à rebâtir. Comment préserver sa vie sociale ?
Ne pas se retirer du monde
Justement, en ne se retirant pas du monde. En continuant à être curieux et à avoir des activités.
« Lorsqu’on quitte sa vie professionnelle, on peut perdre jusqu’à 90 % de ses relations. La très grande majorité des retraités parviennent à restructurer leurs réseaux sociaux, qui sont alors constitués de relations moins nombreuses mais plus significatives. C’est donc davantage la qualité des relations qui compte que le nombre », explique Anne Marcilhac, neurobiologiste, qui dirige l’Institut transdisciplinaire d’étude du vieillissement à Montpellier**.
Le témoignage de Jean-Marc, 68 ans, ancien directeur d’école, le confirme : « Je n’ai pas tout à fait coupé les ponts avec mon métier. Même si j’ai déménagé, j’ai gardé contact avec deux collègues avec lesquels il existait de vrais liens. On se retrouve tous les mois pour manger ensemble. C’est notre petit rituel ».
Bienveillance
Aller vers les autres ne va pas forcément de soi. Beaucoup ont peur d’être mal jugés ou éprouvent des difficultés à surmonter leur timidité. Pour sauter le pas, il est essentiel de faire preuve de bienveillance envers soi, au même titre qu’il convient d’en avoir pour les autres. « Je ne me laisse plus atteindre par des broutilles. Par exemple, si un voisin ne me dit pas bonjour, je me dis qu’il a des préoccupations, qu’il n’a pas la tête à cela. Je ne vais pas me remettre en question. C’est une façon plus apaisée de vivre et de mieux s’accepter à travers le regard de l’autre », confie Geneviève, 83 ans. Il est possible que certaines personnes aient besoin d’un coup de pouce supplémentaire pour avancer sur ce sujet. Pas d’inquiétude, c’est tout à fait normal. Dans ce cas, se faire accompagner par des spécialistes (psychologue, sophrologue…) peut être une bonne solution pour aller de l’avant.
Les petits liens qui font du bien
Une vie sociale riche se construit aussi par de petites interactions au quotidien : le sourire d’un inconnu qui vous tient la porte, un échange banal au marché, à la bibliothèque… Ces moments ne sont pas si anodins et laissent une trace durable dans la journée. « Certes, on parle ici de liens faibles, mais une multitude de liens faibles ancrent solidement les gens dans la société, tout aussi sûrement que des liens plus forts », remarque Anne Marcilhac. Au fil du temps, ces échanges spontanés peuvent déboucher sur de véritables amitiés, comme en témoigne Marie, 77 ans. « Je sais ce que sont la solitude et le deuil. Aujourd’hui, mon état d’esprit est positif. Je suis inscrite à un club de sport et j’ai fraternisé avec plusieurs dames de mon âge. De fil en aiguille, je les ai reçues à la maison… et, une invitation en appelant une autre, on voyage désormais ensemble, un vrai groupe ! »
Partager ses centres d’intérêt
En tissant des liens sociaux, on reste actif intellectuellement et on s’enrichit au contact des autres. Vous avez des passions ? La cuisine, la randonnée, la pétanque ou l’histoire des châteaux ? Partagez-les. Il est plus facile d’avoir des atomes crochus
avec quelqu’un qui a les mêmes centres d’intérêt. Il y a différentes manières d’approcher de nouveaux groupes sociaux : grâce à des clubs, des cours, des activités de bénévolat, ainsi que les réseaux sur Internet, qui facilitent la mise en relation. Et si un centre d’intérêt ou une cause vous tient particulièrement à coeur, pourquoi ne pas créer votre propre association ? « Quand on est ouvert aux autres, engagé dans des associations, des groupes de réflexion, on n’a pas le temps de compter ses cheveux blancs », sourit Denys, 76 ans, retraité très actif.
L’art du bon voisinage
Les mauvais côtés du voisinageont tendance à nous faire oublier les bons : entraide, soutien moral, repas ou café
partagé… Sans avoir à nouer des liens très forts, il importe de s’entendre avec eux pour vivre ensemble toute l’année, défendre des projets collectifs ou passer d’agréables moments. La relation peut même devenir cordiale et chaleureuse, si l’on sait trouver l’équilibre qui convient à tous.
Les fêtes de quartier ou la Fête des voisins – qui a lieu chaque printemps – peuvent être une bonne façon de briser la glace. Mais il existe de nombreuses autres manières de susciter des échanges entre habitants d’un même immeuble ou d’un même quartier. Partager un jardin, organiser des videgreniers, mettre en place une boîte de troc suscitent à la fois des échanges et de l’engagement.
69 %
La « tendresse » est la principale attente des séniors dans leur vie amoureuse (69 %), suivie par le sentiment de « se sentir important pour l’autre » (50 %) et le souhait de « partager ses projets » (43 %).
Source : « L’amour après 60 ans », étude APEF, 2023.
Il n’est pas nécessaire d’avoir beaucoup d’amis. L’important, c’est d’avoir les meilleurs.
Jean-Marc, 68 ans, directeur d’école à la retraite
* « Loneliness and social isolation as risk factors for mortality : a meta-analytic review », Julianne Holt-Lunstad et coll., 2015.
** En son sein, on combat avec force les préjugés, la catégorisation ou la stigmatisation liés à l’âge.
Texte de Christophe Polaszek.