Générations baskets

Le Vendredi 28 juin 2024

Une paire de chaussures sur deux vendues dans le monde est une paire de baskets. Des terrains de sports aux podiums de haute couture, comment sont-elles devenues un véritable phénomène de société ? Décryptage.
 

Tennis, baskets, et plus récemment sneakers… Depuis son invention à la fin du XIXe siècle, la chaussure de sport emprunte différents noms. En France, on les appelle souvent des baskets, en référence à l’univers du sport qui les a vues grandir. Outre-Atlantique, on emploie plutôt le terme de sneakers : son sens découle du verbe to sneak (« se faufiler »), un clin d’œil à leurs semelles en caoutchouc qui permet de se déplacer sans faire de bruit.

Premiers pas

Leur création est de fait intimement liée à celle de la vulcanisation du caoutchouc, un procédé chimique inventé en 1839, qui permet dans les années 1860 de fabriquer les toutes premières baskets durables et flexibles pour les amateurs de croquet. Rapidement, leur adhérence, leur stabilité et leur amorti séduisent les athlètes. L’un des plus anciens modèles, la Converse All Star, est par exemple une chaussure portée par les joueurs de basketball. Autre modèle mythique : la Stan Smith, créée en 1964 par Adidas, est inspirée du nom du joueur de tennis Stanley Roger Smith.

Cependant, c’est véritablement avec les Air Jordan que le jeune public commence à détourner l’usage des baskets pour les imposer comme un élément essentiel de la mode urbaine. Nike, fondée en 1971, doit principalement son ascension fulgurante à cette paire de chaussures fabriquée dans les années 1980. Elle marque le coup d’envoi d’un partenariat juteux avec le célèbre basketteur Michael Jordan, qui écope d’une amende de 5000 $ pour entorse au règlement chaque fois qu’il les porte en match (à l’époque la NBA n’autorisait que les chaussures majoritairement de couleur blanche ce qui n’était pas le cas de la Air Jordan à dominante noire et rouge) !

Plus qu’un accessoire

À partir des années 1990, les terrains et les stades étriqués ne suffisent plus à contenir les phénomènes de réappropriation par la rue, la musique, l’art… Les communautés font valser les codes, pour le plus grand bonheur des marques (ce marché pèse des dizaines de milliards de dollars). Adoubées par les grandes maisons de couture, les baskets deviennent des incontournables accessoires de mode, sophistiqués et décontractés à la fois. On les associe désormais aux robes, aux tenues de soirée. Même au bureau, elles ne choquent plus.

Séries limitées, collections exclusives… Aujourd’hui, l’engouement touche des passionnés de 7 à 77 ans et, sur le marché de la revente, certaines paires atteignent des sommes astronomiques. C’est le cas des Nike Air Back To The Future, arborées à l’origine par le héros Marty McFly dans le film Retour vers le futur 2, et fabriquées en seulement 89 exemplaires en 2016. Leur valeur dépasse actuellement les 70 000 € !

Pour les collectionneurs, c’est aussi afficher une forme de nostalgie d’une époque. Le succès des rééditions le prouve : chaque nouvelle génération veut redécouvrir la paire qu’elle portait autrefois. Et les modèles aux pieds des ados sont parfois vieux de quarante ans ! De là à devenir des objets culturels, il n’y a qu’un pas…